Dans une interview exclusive accordée à Badinews, ce mercredi 1er décembre 2021, Me Masaka Tshiteya Willy, président de la Jeunesse protestante en République démocratique du Congo, a brossé la situation de cette structure de l’Eglise du Christ au Congo (ECC) en particulier, et du pays dans son ensemble. Il a, à cet effet, précisé que seul le Président national de l’ECC en est le responsable ; pas un secrétaire général d’une commission de l’Eglise du Christ au Congo.
Badinews : Comment se porte la Jeunesse protestante que vous dirigez ?
Me Masaka : La jeunesse protestante se porte bien. Nous bénissons le Seigneur de nous avoir bien protégés durant le déroulement des activités de 2021, à travers les différentes visites des fédérations provinciales, l’organisation des formations et activités spirituelles (prière, journée de louange, …). Nous avons expérimenté également la main du Seigneur qui nous a permis de bien organiser notre mois de la jeunesse dans le territoire de Bulungu, précisément dans la province de Kwilu, et la clôture a été organisée en deux temps (à Bukavu et à Goma). Ce qui a permis à tous les leaders de la jeunesse, venant de différentes provinces, de communier et prier avec nos frères et sœurs de ces deux provinces qui ont connu beaucoup de souffrances liées aux multiples conflits armés et la situation de l’éruption volcanique ayant causée désolation et traumatisme dans le chef de la population.
Notre présence à Goma nous a permis non seulement de célébrer le mois de la jeunesse protestante mais également d’organiser le comité exécutif national de la jeunesse qui nous a permis de faire le bilan sur l’évolution de la jeunesse protestante, et nous avons doté notre fédération d’un règlement intérieur révisé, des statuts et règlement intérieur du centre multidisciplinaire des jeunes protestants, branche chargée d’accompagner techniquement et matériellement la Fédération nationale de la Jeunesse protestante (FNJP) à matérialiser ses projets de développement, le plan stratégique de la FNJP, la fiche statistique d’identification des problèmes et besoins de la population de nos différentes provinces. Donc ces différents instruments de travail seront adoptés au congrès national de la jeunesse protestante prévu en février 2022.
Nous sommes très reconnaissants à tous nos pères de l’Eglise, en particulier au Révérend Dr Bokundoa pour son soutien spirituel et matériel très remarquable aux activités de la jeunesse. Nous lui disons infiniment merci pour sa présence à la semaine de la clôture du mois de la jeunesse à Goma, expression de son engament et de sa considération vis-à-vis de la jeunesse par la remise de la coupe de mérite à la FNJP.
Pour finir, nous remercions les personnes de bonne volonté qui nous accompagnent jour et nuit dans la mesure du possible, dans la matérialisation de notre vision : celle de promouvoir le leadership et l’entreprenariat des jeunes en vue d’un développement durable de l’Eglise et de notre société.
Merci aux jeunes protestants se trouvant au niveau des paroisses de différentes communautés membres de l’ECC, au niveau des secteurs, territoires, villes et provinces pour leur engagement à l’œuvre du Seigneur Jésus-Christ, grâce aux activités concrètes et durables qu’ils mettent en place. Merci aussi aux associations des jeunes confessionnels qui collaborent et participent à nos activités. Nous remercions Martine Libertino et la Communauté des médiateurs pour la paix (CMPA) qui fait un grand travail d’éducation à la paix auprès des populations dont notre jeunesse est également bénéficiaire, de ces enseignements qui procurent non seulement la paix, mais réveille les talents se trouvant dans l’homme pour son autonomie totale.
Quelle lecture faites-vous du rapprochement entre les responsables des institutions de la République et le Président national de l’ECC, après l’archevêque catholique ?
Dans un contexte de méfiance réciproque, des crises et des divergences des points de vues sur la mise en place du bureau de la CENI ayant provoqué l’intolérance dans les milieux politique et social tendant à fragiliser la cohésion nationale, nous louons cette initiative qui est pour nous un début de réchauffement du dialogue permanent entre l’Etat congolais et nos différentes églises, en vue d’offrir au peuple congolais un processus électoral qui mette les acteurs en état de confiance et favorise la consolidation de la démocratie dans notre pays.
Notre souhait est de voir aussi cette initiative s’élargir auprès des acteurs politiques de l’opposition et de la société civile parce que le dialogue, l’amour, la tolérance et l’écoute sont les valeurs qui promeuvent l’unité et la cohésion nationale. Et cette approche coûte moins cher par rapport à l’autre de maintien de sécurité au sein de notre pays. Nous sommes d’une même nation. Privilégions le dialogue et le consensus sur les questions de la vie Nationale.
Autrefois l’Eglise catholique co-animait les conférences avec l’ECC, la CENCO représentée par l’abbé N’shole et ECC par le pasteur Senga. Dernièrement, le catholique l’ont fait sans l’ECC. Est-ce qu’il y a un problème en rapport avec la communication ?
Il n’y a aucun problème entre l’ECC et l’Eglise catholique. Nous avons une histoire commune et sommes une même famille. Chacun a son organisation propre et son mode de fonctionnement. La Conférence épiscopale du Congo (CENCO) venait de tenir, sa session extraordinaire. L’abbé N’shole, en sa qualité de Secrétaire général, devait communiquer avec la presse pour rendre publiques les conclusions de leurs réunions.
Dans le cadre du processus de désignation des animateurs de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), la CENCO et l’ECC se retrouvaient pour rendre compte à la population de l’évolution de la situation. Je crois bien qu’il y a des contacts permanents entre les dirigeants de deux Eglises pour la continuation des actions communes qui visent la considération de la paix, la démocratie et le bien-être du peuple congolais.
Les catholiques ont rencontré le Président Tshisekedi et lui ont déposé leur mémo mettant un accent sur l’Education, les élections et la sécurité. Alors qu’à l’ECC, silence radio. Qu’est-ce que les protestants font par rapport à leurs desiderata ?
Chaque Eglise à sa philosophie du travail. Nous venons du Comité exécutif national extraordinaire de l’Eglise du Christ au Congo. Les points principaux abordés par le Comité permanent de la CENCO étaient déjà abordés et les options levées sur l’éducation, les élections, la sécurité et le RAM. Donc en lisant attentivement le P.V, vous serez d’accord avec moi que nos églises sont inspirées par Dieu et elles sont animées de la bonne volonté de voir notre pays avancer.
Quelle est votre lecture concernant les marches dites patriotiques, menées par ces deux églises ? Etes-vous pour ou contre ? ou quel est votre conseil ?
Je suis pour et je suis contre. Je suis pour la marche dans un état d’esprit positif, dans les conditions de la prise de conscience de ce que nous sommes et ce que nous voulons, et d’être déterminés jusqu’à la réalisation de ce que nous voulons. Qu’est-ce que nous voulons ? Le bien-être de tous le Congolais : l’eau, l’électricité, de bonnes routes, la qualité des soins de santé, l’éducation de qualité et la sécurité. C’est ce que nous, personnes créées à l’image de Dieu, toutes tribus, clans, partis politiques ou religions, voulons. Nous méritons respect et amour.
Et nous devons y croire fermement, c’est là où je rejoins Martine Libertino lorsqu’elle dit que la détermination supprime la lâcheté de celui qui a peur et la colère de celui qui se révolte.
Ce qui justifie le refus d’encourager les jeunes de faire les marches, c’est parce que c’est une perte d’énergie qui sera au service des acteurs politiques égoïstes et indifférents à notre souffrance. Lorsque nous voyons les marches des églises associées avec les partis politiques ayant les objectifs bien clairs, conquérir le pouvoir en utilisant tous les enjeux, les laïcs protestants et catholiques devraient se retirer sur cette approche et utiliser une autre approche pouvant continuer à dire non à ce qui porte atteinte au bien-être des Congolais, et dialoguer avec tous les acteurs politiques de l’opposition et du pouvoir pour l’intérêt de tous les Congolais. Dans le contexte actuel, les marches n’apporteront rien d’efficace sur l’amélioration des conditions sociales de l’homme congolais.
L’on assiste à un silence radio au niveau de la présidence de l’ECC. D’aucuns disent que le président et tout le synode encouragent le porte-parole de l’ECC à allumer le feu là où du côté catholique, on joue au sapeur-pompier. Comment réagissez-vous ?
L’article 20, alinéa 1er, 2 et 3 de la constitution de l’Eglise du Christ au Congo stipule que « le Président National est le premier responsable de l’Eglise du Christ au Congo. A ce titre, il a la responsabilité et la direction de la Présidence nationale. Il agit par voie de décision, circulaire, directive et instruction. Il est assisté d’un Premier Vice-Président national Représentant légal premier suppléant et d’un Deuxième Vice-Président national Représentant légal deuxième suppléant de l’Eglise du Christ au Congo qui le remplacent en cas d’absence ou d’empêchement »
L’article 21, alinéa 1er , 2, et 3 renchérit : « le Président national est le porte-parole du Culte Protestant tant au plan national et qu’International. Il communique par des lettres pastorales ou par toute autre voie. Il est le garant du bon fonctionnement des structures organiques de l’ECC ».
A la lumière de ces deux articles toute l’Eglise sera d’accord avec moi que le Révérend Eric Senga n’est pas le porte-parole de l’Eglise du Christ au Congo. Toutes ses déclarations au nom de l’Eglise du Christ au Congo sont nulles et nulles d’effets. Il a la liberté, comme Secrétaire général de la Commission Justice, Paix et Sauvegarde de la Création de l’Eglise du Christ au Congo de faire ses analyses liées aux attributions de son Département et le soumettre à l’autorité compétente et non prendre des positions au nom de l’Eglise du Christ au Congo. Notre Président national sait bien parler avec sagesse et toute responsabilité. La Jeunesse Protestante ne permettra à aucun membre de notre Eglise, d’usurper les attributions sacrées du Président national de l’Eglise du Christ au Congo ni ses organes.
Avez-vous un mot de la fin ? Un appel ? Une exhortation ?
Je vous remercie encore pour cette invitation. Je voudrais rassurer notre Président national, tous les Vice-Présidents Nationaux de l’ECC ainsi que tous les animateurs des organes de l’Eglise que la Jeunesse protestante reste fidèle et loyale à la vision de l’Eglise, conduite par notre Papa Président National et Représentant légal de l’ECC, Révérend Docteur André Gédéon Bokundoa. Nous, la jeunesse, allons travailler conformément à nos objectifs statutaires pour contribuer à la Paix, la démocratie, d’instauration de l’Etat de droit, la réussite du processus électoral conformément à la vision et orientations de notre Eglise. Nous nous engageons également à prier pour le Chef de l’Etat et toutes les Institutions de la République pour que leurs actions contribuent à la paix, le développement et à la cohésion nationale. La Jeunesse protestante n’est pas impliquée dans la Déclaration des Forces Sociales et Politiques de la Nation pour une CENI véritablement indépendante, dépolitisée, non instrumentalisée et en faveur des élections crédibles, libres, transparentes, inclusives et apaisées en 2023 du fait que non seulement nous n’avons pas été associés, mais aussi la présence remarquable des partis politiques qui risquent de biaiser la mission des Laïcs Protestants et Catholiques, au regard des répercussions et récupérations politiciennes. J’invite toute la Jeunesse Protestante de la République démocratique du Congo, de se mobiliser et participer à la journée de jeûne et prière organisée par le Département de l’Evangélisation de notre Eglise, sous la direction du Révérend Docteur Président National de l’ECC.
A vous tous, jeunes congolais et protestants en particulier, votre salut ne repose pas sur les partis politiques, mais sur vous-mêmes. Prenez votre vie au sérieux, en mettant en action vos talents pour votre bien et le bonheur de notre pays.
Propos recueillis par Badinews