Invité à prendre part d’entre les 40 participants au Sommet virtuel des chefs d’Etat et de gouvernements sur le climat qui se tient du 22 au 23 avril 2021, sous la coordination du Président américain Joe Biden, le Président de la République démocratique du Congo Félix Tshisekedi, président en exercice de l’Union africaine (UA) a prononcé un mot très attendu par tous les participants.
Ci-dessous l’intégralité de son intervention…
Excellence Monsieur le Président des États-Unis d’Amérique, Excellences Mesdames et Messieurs les Chefs d’État et de Gouvernement,
Excellence Monsieur le Secrétaire Général des Nations Unies, Mesdames et Messieurs,
Je suis particulièrement honoré de prendre part à cet important sommet virtuel sur le climat initié par le Président Joe BIDEN. Cette initiative est d’autant plus importante qu’elle se tient en ce jour symbolique de la célébration de la Journée de la terre.
J’aimerais, également, saisir cette opportunité pour adresser, au nom de la République Démocratique du Congo ainsi qu’au nom de l’Afrique, en ma qualité de Président en exercice de l’Union africaine, nos sincères félicitations à l’endroit des États-Unis d’Amérique et à son Président pour la noble décision prise de réintégrer l’Accord de Paris sur le Climat.
Mesdames et Messieurs,
L’Afrique est l’un des continents les plus affectés par les effets néfastes du changement climatique. En effet, le changement climatique a pour corollaire d’influer négativement sur le développement socio-économique, la paix et la sécurité, hypothéquant ainsi, in fine, le bien-être des populations et des générations futures.
C’est pourquoi la République Démocratique du Congo tout comme l’Afrique réitèrent, ici, leur engagement à mettre en œuvre l’Accord de Paris ainsi qu’à contribuer, de ce fait, à la lutte globale contre le changement climatique dans le contexte du développement durable et de la réduction de la pauvreté.
Pour la République Démocratique du Congo, cette mise en œuvre se traduit, entre autres, par une contribution déterminée à l’échelle nationale qui prévoit une réduction de 17% des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030. Cette contribution se chiffre à environ 21 milliards de dollars et prend en compte aussi bien des actions d’atténuation que d’adaptation. À ce propos, eu égard à l’important potentiel forestier dont dispose la République Démocratique du Congo, nous nous attelons à mener des actions qui permettent, non seulement, la protection de nos forêts mais aussi leur gestion efficiente, tout en nourrissant l’ambition de restaurer notre couvert forestier à 63,5% à l’horizon 2030. Parmi ces actions figure, notamment, l’ambitieux programme intergénérationnel de reforestation qui prévoit de planter 1 milliard d’arbre d’ici 2023, sur toute l’étendue de notre territoire national.
Conformément à la révision actuelle de l’accord qui intègrera désormais les impératifs liés à la préservation de la biodiversité, des tourbières, ainsi que d’autres secteurs additionnels émetteurs tels que l’énergie, les déchets et le transport multimodal, nous poursuivons l’objectif de découpler l’utilisation des ressources forestières des secteurs importants de l’économie nationale dont l’énergie et l’agriculture.
Outre ces résolutions, nous avons levé l’option de valoriser notre immense mix énergétique renouvelable constitué de l’hydroélectricité, de la photovoltaïque solaire ainsi que de l’exploitation durable de nos réserves
en métaux stratégiques verts essentiels qui contribuera sans aucun doute à la décarbonation de notre économie.
En tant que Président en exercice de l’Union africaine, il ne fait aucun doute dans mon esprit que les pays africains font partie de la solution pour pallier les effets du changement climatique. En tant que président de la République Démocratique du Congo, je m’emploie à protéger au mieux les forêts tropicales du bassin du Congo ainsi qu’à travailler avec nos voisins et la communauté internationale pour ce faire. Ces forêts sont d’une importance critique à l’échelle mondiale.
Plus vaste que l’Alaska, à titre d’exemple, elles s’étendent sur six pays d’Afrique centrale et forment le bassin du Congo qui contient près de 2 millions de kilomètres carrés de forêt tropicale. Le bassin du Congo abrite également le plus grand complexe de tourbières tropicales de la planète, contenant 30 milliards de tonnes métriques de carbone, soit trois années d’émissions mondiales. Cependant, en toute franchise, ces forêts sont en danger. L’exploitation illégale du bois et d’autres matières premières, ainsi que la consommation incontrôlée d’énergie, menacent le « deuxième poumon » du monde. Nous pouvons améliorer la vie des personnes vivant dans ces zones en combattant les activités de corruption et en mettant en œuvre une production d’énergie durable et de meilleures pratiques agricoles.
La République Démocratique du Congo essaie de faire sa part mais à vrai dire nous pouvons faire davantage avec le soutien de la communauté internationale. Je sais, notamment, suite à mes échanges avec le Président Biden et la Vice-Présidente Harris que les États-Unis sont disposés à s’investir dans cette question fondamentale et j’ai également hâte d’approfondir notre coopération avec tous les pays, toutes les organisations internationales ainsi que toutes les entités privées qui veulent faire une différence au profit des générations futures.
Mesdames et Messieurs,
Les mécanismes financiers existants ne permettent pas l’atteinte des objectifs de l’Accord de Paris, ni par leurs dispositifs, ni par leur coût de mise en œuvre.
Le prix actuel du carbone forestier fixé à 5 dollars la tonne n’est ni équitable, ni réaliste. En outre, l’atteinte de la neutralité carbone ne pourra se matérialiser sans la prise en compte de la conservation et de la régénération des forêts. A cet effet, un prix juste du carbone forestier qui intègre les opportunités abandonnées devrait s’élever à au moins 100 dollars la tonne.
Mesdames et Messieurs,
Il est important que ce Sommet accélère la mobilisation de ressources financières additionnelles et conséquentes. Cela exige aussi de simplifier les procédures d’accès aux financements climatiques pour les pays les moins avancés dont la majorité se trouve en Afrique.
A cet égard, je voudrais rappeler l’importance de l’engagement des pays développés à mobiliser 100 milliards de dollars par an à partir de 2020 et à le rehausser à l’horizon 2025.
Enfin, je formule ici le vœu que ce Sommet permette de baliser le chemin de la 26ème Conférence des Parties à la Convention-Cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique.
Je vous remercie de votre attention.